Hélène Dorion / Pas même le bruit d'un fleuve (2020)

Les poèmes peuvent-ils nous sauver du naufrage?

Je connaisssais de réputation la poétesse récompensée par de nombreux prix, ici et ailleurs dans la francophonie. N'étant pas un lecteur de poésie, son oeuvre m'était un peu inconnue.

Je l'ai entendue récemment à Radio-Canada parlant de son dernier livre «Pas même le bruit d'un fleuve». Je dis livre car je ne sais au juste si on peut parler d'un roman, d'un récit ou d'un récit poétique. 

Comme je suis  originaire des Iles-de-la-Madeleine,  cette histoire de mort en mer et  de naufrage a tout de suite piqué ma curiosité.

Curiosité bien récompensée d'ailleurs.

«Pas même le bruit d'un fleuve» raconte le destin  de deux femmes (la mère et la grand-mère) intimement lié au fleuve : un accident survenu en 1944 et le naufrage de l'Empress of Ireland en 1914.

C'est un très beau livre tout en nuances et en sensibilité qui parle d'amour, de création avec en filigrane cette question : « les poèmes peuvent-ils nous sauver du naufrage?»

16 mars 2020

Haruki Murakami / Le meurtre du commandeur I et II (2019)

Haruki Murakami / Le meurtre du commandeur (livre 1). Une idée apparaît. (2018)

Plonger dans l'univers romanesque de Murakami, c'est toute une aventure! 

Son dernier roman ne fait pas exception à la règle.  «Le meurtre du commandant», c'est un tableau peint par Tomoiko Amada, un artiste de génie qui a sombré dans la maladie de l'oubli.

Le tableau en question est une sorte de métaphore de l'Anchluss (annexion forcée de l'Autriche à l'Allemagne en 1938) et d'une tentative d'assasinat contre Henrich Himler à laquelle  aurait participé Amada.

Le narrateur, portraitiste, quitté par sa femme, entreprend un road trip à travers le Japon pour se retrouver au coeur des montagnes dans la maison inoccupée du peintre Amada dont il est en quelque sorte le gardien.

Un riche voisin étrange, Wataru Menshiki,  une clochette  qui sonne la nuit dans un étrange sanctuaire bouddhiste sous-terrain, un personnage qui sort d'un tableau, pas de doute, on est bien dans l'univers de Murakami entre le réel et l'irréel.

Je viens de terminer le livre I et j'entamerai sous peu la suite,  le livre II. «La métaphore se déplace»

J'ai très hâte de voir comment aboutira cette étrange histoire.

À lire aussi de Murakami, parmi ses nombreux ouvrages :

❤ Kafka sur le rivage (2003)

❤ Chroniques de l'oiseau à ressort (1994-1995)

❤ La ballade de l'impossible (1987)

❤ IQ84 (livres I, II et III) (2009-2011)

13 mars 2020

Haruki Murakami / Le meurtre du commandeur : livre 2 : la métaphore se déplace

Ça y est.  Je viens tout juste de terminer «la métaphore se déplace» qui met fin aux aventures du peintre narrateur. Marié, la jeune fille dont il faisait le portrait est disparue. 

Il devra traverser un monde parallèle pour sauver Marié. Tous les personnages du tableau «Le meurtre du commandeur» seront mis à contribution pour l'aider sans sa mission. C'est l'énigmatique Menshiki qui retrouvera le narrateur au fond de la fosse à la cloche d'où était partie toute cette histoire dans le livre 1.

Tout est bien qui finit bien. Murakami, fidèle à lui-même, recollera tous les morceaux pour un happy end.

J'ai de la difficulté à comprendre pouquoi je suis aussi fasciné par l'oeuvre de Murakami, moi qui, a priori, ne suis pas amateur de paranormal et de mondes parallèles. Mais Murakami est un tel conteur....

Micheal  Imperoli / Wild Side (2018)

Take a Walk on the Wild Side

En lisant ce petit roman de Micheal Imperioli, on ne peut s'empêcher d'avoir en tête Take a Walk on the Wild Side, une des chansons les plus connues de Lou Reed.

D'ailleurs, de Lou Reed, il en sera largement question dans ce roman.

Matthew a dix-sept ans et vit seul avec sa mère. À la suite d'un héritage inattendu, ils déménagent au cœur de Manhattan et une nouvelle vie s'offre à lui.

Il fera la connaissance de Véronica, une énigmatique jeune fille  et d'un certain Lou Reed qui habite le même immeuble.

Ces rencontres transformeront le jeune Matthew.

Il vouera un véritable culte au chanteur, se laissant entraîner dans ses aventures un peu improbables,  lui servant  souvent de coursier.

Il raconte cette anecdote hilarante où Lou Reed lui demande de livrer un immense amplificateur à l'autre bout de la ville dans un camion emprunté à son employeur, alors qu'il ne sait pas conduire.

Même si l'image qu'il donne de Lou Reed n'est pas toujours à son avantage, on sent quand même une grande admiration pour le chanteur.

Toutefois, pour Matthew, qui se retrouvera en clinique psychiatrique, son histoire avec Veronica aura eu des conséquences  plus désastreuses .

Wild Side se termine sur un vibrant hommage au chanteur du Velvet Underground alors que Matthew roule en Californie en novembre  2013.

Lou Reed est décédé le 27 octobre de la même année.

Laurent Seksik / le cas Edward (2013)

«être le fils d'Einstein ne m'aura servi à rien»

On peut le dire d'emblée, la vie d'Einstein ne fut pas un long fleuve tranquille.

On  connaît Albert Einstein  comme cet immense génie de la physique, père de la théorie de la relativité,  mais de sa vie familiale,  on savait peu de choses.

Mis à part l'échec de son mariage et son exil vers l'Amérique en 1933, le grand drame du célèbre savant aura été le destin de son fils Eduard, diagnostiqué schizophrène dès son jeune âge.

Il verra son fils pour la dernière fois à Berlin en 1933 juste avant son départ (photo couverture du livre).  Eduard demeurera seul à Zurich avec sa mère, son autre frère ayant aussi immigré en Amérique.

Le roman de Seksik retrace les parcours croisés d'Einstein à Princetown, celui de sa première femme Mileva et celui d'Eduard qui se raconte d'une manière absolument bouleversante. Un mélange de lucidité et de colère contre son père, de folie hallucinatoire. Il passe son temps entre l'asile psychiatrique entrecoupé de séjours chez sa mère et plus tard dans une famille d'accueil après le décès de celle-ci en 1948.

C'est un être fragile, conscient de sa maladie et d'une très grande intelligence. Et le personnage décrit par Seksik est très attachant.

Dans une entrevue vers la fin de sa vie (il est mort en 1965, dix ans après son célèbre père), il aura cette phrase lapidaire «être le fils d'Albert Einstein ne m'aura servi à rien».

C'est un roman coup de poing, littéralement.  J'ai beaucoup beaucoup aimé.

2 février 2020.

Christian Bobin / Le Très Bas (1992)

François d'Assise : le hippie avant la lettre

Ce petit livre (129 pages) de Christian Bobin parle de la vie, de la mort, d'amour, de dénuement, de pauvreté et  d'humilité avec en toile de fond, la vie ascétique de François d'Assise.

François d'Assise que l'on connaît immortalisé dans sa longue robe de bure brune quitte sa famille pour parcourir le monde : il parle aux oiseaux, il va à l'encontre des gens.  Il prêche la simplicité et le détachement.

Véritable hippie avant la lettre, François d'Assise a fait l'objet de plusieurs films dont celui de F. Zeffirelli sorti en 1972, «François et le chemin du soleil» avec la musique de Donovan.

Il y a quelques semaines Christian Bobin était invité sur le plateau de «La grande librairie» en compagnie entre autre de J.-M.-G. Le Clézio qui avait plébiscité cet ouvrage simple et lumineux paru il y a déjà plusieurs années. 

29 janvier 2020.

Henning Mankell / le cerveau de kennedy (2009)

Les vies secrètes d'un fils

On connaît surtout Henning Menkell comme le «père» de Kurt Wallender, l'officier de police chargé de résoudre des meurtres souvent tordus dans la ville de Malmö dans le sud de la Suède. Deux excellentes séries télé ont d'ailleurs  été réalisées à partir des romans consacrés à l'enquêteur suédois.

Mais on ne peut réduire à cela  la production littéraire de Mankell qui partagait sa vie entre l'Afrique et la Suède. Pas  étonnant d'ailleurs que les nombreux autres romans qu'il a écrits se déroulent  principalement dans ces lieux.

Le cerveau de Kennedy paru en 2009 est un «thriller psychologique», appelons ça comme ça, absolument envoûtant. 

Louise Cantor, archéologue attachée à l'universite d'Upsala, travaille depuis plusieurs années sur des sites dans le Péloponèse. Les fouilles étant interrompues durant l'hiver, elle rentre en Suède, pressée de revoir son fils unique de 25 ans, Henrick qui vit à Stockholm.

En arrivant à son appartement, elle le découvre mort dans son lit. Il n'était apparemment pas malade. S'est-il suicidé? Elle n'y croit pas, même si les apparences semblent prouver le contraire.

Dévastée, Louise décide de trouver des explications à cette mort, pour elle, inexplicable. Sa quête la mènera en Australie où elle retrouvera le père d'Henrick, à  Barcelone, en Afrique du sud, où elle ira de découvertes en découvertes sur la vie secrète de son fils.

Je m'arrête ici...pas question que je vous en raconte plus. J'ai beaucoup aimé...sinon je n'en parlerais pas.

Deux autres romans de Henning Mankell que j'ai beaucoup aimés :

❤ Les chaussures italiennes (2009)

❤ Les bottes suédoises (2016)

26 janvier 2020

François Weyergans / Trois jours chez ma mère (2005)

L'angoisse de la page blanche

«Trois jours chez ma mère» de François Weyergans, prix Goncourt 2005, est un roman dans le roman.

L'écrivain en panne d'inspiration qui vit bien au dessus de ses moyens, qui adore les grands hôtels et les objets griffés, qui multiplie les conquêtes amoureuses et les voyages aux quatre coins du globe, c'est François Weywegraf, le faire valoir, à peine déguisé, de l'auteur.

C'est raconté avec beaucoup de style. Ses relations avec sa vieille mère veuve et retirée dans son vieux prieuré en Provence de même que ses démêlés avec le fisc sont racontées avec tendresse et humour.

J'avais beaucoup aimé «Le Radeau de la Méduse» paru en 1983, le récit d'Antoine, scénariste pour la télé qui doit écrire un scénario autour du célèbre tableau de Géricault et qui peine à terminer son travail.

12 janvier 2020

Élizabeth Benoît / Suzanne Travolta (2019) P.O.L

Chroniques du Mile-End

Marie-Jo s'est suicidée dans son appartement du Mile-End.

Laurent, son frère comédien à la télé, parle d'elle avec Suzanne, la narratrice. Il parle aussi de sa mère, une mère envahissante. Laurent et Marie-Jo sont un peu comme les personnages de Bérénice et son frère dans «La vallée des Avalés» de Réjean Ducharme.

Il est aussi question de Ray un ami de Laurent. Toute cette bohème, on la devine trentenaire, se croise dans le quartier. On parle les uns des autres.

Un véritable petit guide du Mile-End.

L'auteure, montréalaise, habite à Paris depuis quelques années et travaille dans l'informatique, comme Suzanne d'ailleurs. Un premier roman écrit dans un style assez singulier, très appuyé, presque scandé par des répétitions, ce qui n'est pas sans rappeler Marguerite Duras. C'est parfois un peu brumeux : il ne faut pas chercher à comprendre.

Quant à Suzanne Travolta, son nom n'est jamais mentionné dans le roman...uniquement sur la page titre. Un ami habitant justement le Mile-End en avait parlé sur son Facebook comme un des meilleurs romans qu'il avait lus récemment.

Du style, certainement.

Une découverte que je recommande à tous les lecteurs qui aiment sortir des sentiers battus.

6 janvier 2020

Dany laferrière . Vers d'autres rives (2019)

Haïti ses peintres et ses écrivains dessinés par l'auteur

En 2018, Dany Laferrière publiait « Autoportrait de Paris avec chat » un ouvrage au style inclassable entièrement écrit à la main avec des dessins de l'auteur.

Véritable labyrinthe, ce livre qui part dans toutes les directions, à gauche, à droite, en haut, en bas est constitué toutes sortes d'anecdotes sur Paris, ses écrivains, de Proust à Henry Miller... c'est une lecture éclatée que l'on distille à petites doses pour faire durer le plaisir.

Il remet ça avec «Vers d'autres rives» qui raconte cette fois Haïti, ses peintres, sa grand-mère Da, Miami. Les dessins de l'auteur, toujours aussi colorés, accompagnent un récit plus structuré, moins éclaté que dans l'ouvrage précédent.

Quelle belle idée de remettre au goût du jour l'écriture manuscrite.

7 décembre 2019

Guillaume Muso / la vie secrète des écrivains (2018)

Meurtre en Méditerranée

J'avais souvent vu les livres de cet écrivain très populaire, peut-être trop, diront certains.

«La vie secrète des écrivains » est un roman sur l'écriture et les écrivains. Nathan Fowles, auteur de trois romans cultes, annonce qu'il a cessé d'écrire et qu'il se retire dans une île au large des côtes la Méditerranée.

Survient alors un meurtre qui ébranle la petite communaité de l'île et qui aura des rebondissements spectaculaires.

À défaut d'être de la grande littérature, c'est un excellent thriller que l'ai littéralement dévoré en quelques heures.

30 décembre 2019